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octobre-novembre 1999
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Cliquez sur le ciel pour Écrire à Marie Mélisou

Août-octobre 99
Epi de sable
Je voudrais, je voudrais tant, de la rive ici vers les rives
là-bas, rassembler la réalité fragmentée. Les rayons de miel
versés lorsque rétrécissent ou s'élargissent leurs visages.
Dégoulinent et s'épandent telle une boue ôtée de sens.
Sans même un petit infini.
Je voudrais, je voudrais tant, de la mer ici aux pierres à
bouches là-bas déborder d'une joie oubliée sur le blanc du
sable d'où dépasse un épi.
Mes limites bleues, accumulées sans trêve, édifiées puis par
quelques mains brisées, s'opposent au vide imposé. Avide de
s'auto-effacer. Elles connaissent le monde qui tombe.
Sans même un petit infini.
Je voudrais, je voudrais tant, du bout de mon corps initier
l'écume quand palissent les jours, témoins d'illusions,
fenêtres tragiques ou, immense famille de douleurs.
Sans même un petit infini.
Marie Mélisou Août 1999

Porte nocturne un jour mouillé
la pluie sur la poussière et une maison
grande nef d'absence
lorsque la nuit voyage au milieu du jour
se distingue l'envol
fibres d'archipels s'interposent
de grain en grain
sauts en oubliant le temps
un bond dans l'espace
pour clore le silence
un jour mouillé
ouvrir des clartés Renaisssance
l'essentiel est enchanté
parce que
le trajet clair est sans murs
Marie Mélisou Août 1999

Elle
au c¦ur palissade
elle est un éléphant dans le soir
à ennemi de soi
serpent en mue puant de gibet
elle essuie jusqu'au mur
les pleurs sans quoi vivre
ne sait regarder qu'en dedans
loupe de lutteuse sans raison
éclair de couteau à malheur
elle n'en n'est pas plus heureuse
eux non plus
cruelle de pures extases
lorsqu'elle cerne de questions
les yeux qui étouffent sans fond
elle plante des arbres morts
et saccage l'émotion
elle la jalousie
n'en n'est pas plus heureuse
l'autre l'enfermé le dégoutté
non plus
il baisse son store davantage
l'irrespirable artificiel perd
elle finie dépouillée
Marie Mélisou Août 1999

Crachats
Elle crache.
Verte de rage, elle crache, bruyante et insolente. Nu-pieds,
l'¦il mauvais, ses vulves fouillées, répandue en zigzag, ses
injonctions en habileté suprême jusqu'à l'aveuglette de
l'horizon, elle s'offre en lit défoncé de cris et de peau
chahut.
Elle crache.
Ses glaires sur les rochers, elle crache, roule, fièvre. Sa
colère, profonde, intense, violente, en grands arceaux de
papiers huilés et remués jonglent gonflent. Ils tirent au sort
parmi les risées qui l'innervent et la parcourent.
Elle crache.
Ses têtes en lames, froide, elle crache à la figure de ceux qui la
contemple, se fichant de leur admiration extrême aux frissons
loqueux. Ne cessant un seul instant, mue par ses tréfonds en
proie aux vers fourmillements, elle enferme les rayons pétrifiés.
Elle crache. Ses crachats iodés écument rient ricochent.
Et devant elle, je ris aussi. Moi, l'un des grains de sa rive. De
la voir ainsi, à chaque équinoxe m'abreuve, me gorge, me peuple.
Je me remplis d'elle immensément. Je lui vole un peu de son sel
de vie.
Marie Mélisou août 1999

A pendre
Ailleurs ou là-bas.
Flou en pleine lumière, le chemin qui marche se dissipe
dans l'extérieur. La perte du réel, grave s'il en est,
devrait être réparée.
Devrait comme pourrait.
Pourrait comme sera.
C¦ur à pendre à la fenêtre, qu'il brille de mille feux.
Ailleurs ou là-bas.
Libérée, sans n¦ud, papillon en électrons libres, je
t'aide à grimper sur un rêve.
Il y a des terres où l'on marche et des terres où l'on
songe.
Ailleurs ou là-bas.
Marie Mélisou août 1999

Chair de lune
face et pile d'ombres à la lumière
je pantelle sous les pierres tes regards
sur des moments alternés
se content les heures cruelles
auréoles des pas dans la ville chaude
nimbe passage de dernières portes
où quand je tue tu frissonnes
chair de lune assassinée
d'interlopes moments
le monde cherche autour de quoi tourner
hache aux mots bruyants
saigne un temps crâne
Marie Mélisou août 1999

Vitrine diabolique
Le pinceau du retoucheur à colorier la vie pénétrait encore
chaque interstice. Non, je recommence. Le pinceau du
retoucheur de la vie coloriait, il tentait de pénétrer chaque
interstice.
Oui, je préfère ces mots. Ils sont davantage justes.
Réalité. Ou création littéraire.
Je veux parler d'une époque où j'étais indécise. Je crois
que j'ai tout su la veille de mon départ. TOUT, entends-tu.
Tout ce que nous allions partager. Tous les échecs. Mais
j'ai posé sur moi, par conséquent sur toi, une immense voile
à cacher la vérité, un drapé esthétique tel que je les
aime. Ou les aimais.
Pour tenter de vivre. Comme toi.
Une immense voile à souffler des mots autant qu'une mère
abreuve la vie, lorsque ces même mots se frappent au silence
des nuits. Le contraire du bruit dans les haubans.
maintenant
je confronte le silence
raconte les frappes nuque
lui déballe quelle vitrine diabolique
éblouie les jours
Tendues tensions, se bombe le dôme, se grisent les pensées.
Elles commandent de grands choix.
Quand à la glu, ce jus de houx, elle envahie nos pas, ils
frappent la terre.
Au fur et à mesure qu'elle remonte le temps, il se perd. Les
jours, leur précision, s'estompent, se rétrécissent.
Ils finiront sur des sinuosités devenues obscures. Comme
tous les mots.
Marie Mélisou août sept. 1999

Jardin des anges
une aile de papillon
deux graviers esseulés
trois petits bouts de bois
et quelque perles d'eau de là
la mort lasse
posée sur le coteau
regarde certains mots
ils n'ont leur place nulle part
errent courent ne s'épuisent
la félicité la vrai
n'existe plus même ici
durant de brefs instants
sur le soyeux des fleurs
comme on remonte une crevasse
centimètre après centimètre
avec dans sa poche
une aile fragile de papillon
deux graviers à tripoter
trois petits bouts de bois
et quelque perles d'eau de dedans
Marie Mélisou sept. 1999

Couleur a passé
sur une route de campagne
où chaque platane possède son mort
gros immenses
comme dessinés par Bottero
des sapins montent la garde autour d'un champ
un champ peuplé de noirs soleils
amaigris et flétris
ils saluent penchent ploient sans un pleur
plus aucun n'est fier
jusqu'à l'horizon un temps ratatiné
car le moment est venu
est venu pour la faucheuse
la coupeuse d'engloutir leurs restes vie
temps d'andains
c'en est fini pour la saison
des tournesols de cette année
seul reste même passé
le jaune
la couleur a passer
Marie Mélisou août sept. 1999

"Quand on ne va nul part, on ne peut pas
beaucoup se tromper."
Yeux grands fermés
fluide le sable sous leur deux peaux
ils écoutent battre le c¦ur de l'un et de l'autre
c'est dire le silence
la gueule du ciel coloré
est ouverte sur des nuages à vomir les jours
en bas la température tripote la terre
pour l'aider à s'ébrouer
injures des hommes insatisfaits
plaintes au fond de leurs envies
des sourires et des râles
yeux grands fermés
pour avancer davantage que reculer
je m'en vais acheter une couverture
à accoutumer les pieux dressés
Marie Mélisou août 1999

Frise de vies
les étoffes de chair
pulsions à éclater les échos
tissus imaginaires
prennent les plis de l'habitude
invitent à leur insu
serpentent s'entortillent
spirales impétueuses
zébrures dardées voiles tendus
entrelacs sensuels maléfices
mosaïques à peindre le feuillage
de multiples forêts
se reflètent les âmes de matières infinies
Marie Mélisou sept. 1999

Rêvé aussi
le derme de la réalité
emporté apportée
comme un ruban d'existence brève
en danger d'invention
déroule l'histoire
à garder les portes ouvertes
privilège des galops éblouissants
les imaginaires se promènent
sans morose sur beaux chahuts
alors qu'assistante du destin
la peau des choses
comme de petites pierres blanches
à marquer le chemin sur la mer
ouvre un relief d'indescriptibles cohues
traduction à admirer le monde
un miroir opportun
en support le plus juste
ôte toute attache
Marie Mélisou sept.1999

Sans honte
le sol mouillé
se sert à la nuit claire
brûlée de lune
d'un vieux chagrin
Marie Mélisou 9 septembre 1999

Semblants
en haut de côté
exprimer l'intérieur
maltraitées flammes de vent
actions forgées de songes
plantés de boues incolores
porte des sens je dors avec
semblants des effets que ça faisait
nattes de tortures au corail vivant
semblants de tous les paraissait
en bas à travers
petits coups intervalles
entre rien et rien
une échelle écarlate
dans l'ombre de tessons de rages
le temps orageux
n'est pas à bout de ressources
Marie Mélisou sept. 1999

Danses d'ébauches
ils avancent
danses d'ébauches
grands s'en quêtent de paravents
d'ores et déjà beaux
simple fait d'être ils sont
danses d'ébauches
ma douleur vive
lumières en déplacements d'avant
où l'obscurité des nuits tendues
voile à âme nocturne effleura leur douceur
danses d'ébauches
couleurs interminables je souris dedans
aux jours d'un égal vif froid
pourtant à ces images d'enfants en devenir
imaginées danses
à peine ébauchées

Marie Mélisou sept. 1999
"Et le monde se meurt une rupture se
produit dans les anneaux d'air"
André Breton
Le temps né d'une chute
morceau d'après-midi déjà consommé
sur le satin innervé des pages
au rebours des cités
poignée la plus intime
conscience cachée mince liseré
une voyagère obsolète
en goûte la saveur
s'en émousse d'autant
le bonheur artilleur
fugueur à embarquer à converser
au plus lointain domaine
le temps fasciné
né d'une chute suspendue
mène vers le fleuve sur l'eau
le commencé
jusqu'au tout fini
Marie Mélisou sept. 1999

" Le temps n'est rien d'autre qu'une distension,
mais une distension de quoi, je ne sais pas au
juste, probablement de l'âme elle-même "
St-Augustin
Passant
je pense à toi
passant
du tout jamais tout le temps
tes yeux en roue à aubes
crissent le sel comme
si tu allais mordre
cuirasse du mal connaître
j'entresuis qui tu étais
à hauts sentiments
au vouloir sans pouvoir
racines d'entrailles en avant
gerbes de vols noirs
tu achèves sauvagement
chaque ligne à chaleur
je pense à toi
passant
du tout jamais souvent
Marie Mélisou sept. 1999

Si tu le lis
si tu le lis
alors que j'écris petit
mes mots ont encore un c¦ur
Si tu le lis, parce que je l'écris, voici : Durant la
nuit il est arrivé quelque chose au vent. Troublé d'un
frémissement plus que grand, une ampleur l'a tiré d'où
il se vautrait à terre.
Ce vent, qui semble être toi déguisé, pose des touches
de couleurs et porte le bonheur d'un jour né.
Il renifle, monte, tâte, caresse. Il oublie ce que je
dis. N'entend pas ce que je crie. Il laisse des traces
de son âme partout, ouverte à tous les sentiers. Chante
que personne n'est vraiment soi. Ni entièrement autre.
Si tu le lis, c'est que je le vis.
Et que je l'ai dit.
Marie Mélisou sept 1999
