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  -- Non, pas celle là ! -
 
 
 
Non
pas cette branche !
elle se dirige vers l'homme
au fur et à mesure qu'on descend ses feuilles
elles deviennent graduellement roses
et bien trop humides pour ma petite santé
avec des bourgeons de conscience masquée
qui laissent prévoir le pire
station debout 
marche à mentir
premier rendez-vous
non non  
je veux rester avec monsieur Darwin et madame Dieu
à faire la planche
sur la branche à sève céleste
un jour il me fabriqueront une pensée
sur papier bible et caractères gothiques
et je démontrerai
que l'homme n'est qu'une invention 
des mots de bengale jetés d'un seau
je parlerai du haut de la chaire d'où fut jeté Galileo 
 
Quoi l'amour quoi l'amour ? 
amnésie.... amniotique.... amour
pas d'amour dans le Vidal 
Ni sur le tableau de Mendeleiev 
parlez moi de la gravitation d'Adam autour d'Eve
la rotation des ancètres
les isolants à fenêtres
la loi d'indifférence 
la culture des ombres en laboratoire
les baillons protocoles
voilà du solide 
sans battements sans respirer 
sans branches à rosir
sans acides à hélices  
d'abord vous avez vu ce qui est arrivé à Nungesser et Coli
d'avoir voulu s'embrasser en plein vol ? 
 
Mais l'amour
cette hypothèse guerrière
voyez-vous des traces de baisers   
sur les tablettes sumériennes ? 
des petits coeurs gravés dans les os ? 
claquement des doigts
moi toi toi moi
Io sono nato oggi 
West Side Story
poum tchak
 
Non, pas ce corps
elle le connaît bien trop
il a posé tant de cils sur le sien
pas ce visage 
elle l'a recouvert de volets
avec des petits coeurs dans le bois blanc
pour faire signe aux trains qui passent devant
non, pas cette goutte venue du ciel
cette larme conduit vers l'homme en général
et vers elle en particulier
 
Tu la descends
en te guidant sur la carte des courants
 
Tu es déjà trop près d'elle pour remonter
au fur et à mesure que tu t'es rapproché du sol
un coeur s'est mis à pousser dans ta poitrine
tu l'aimes tu l'aimes
cette femme en couleurs tressées
cette fleur à animer les paniers
poum tchak
c'est émouvant comme ton coeur lui ressemble
même ciel autour des yeux
même lèvres à terre bleue
 
Tu as donné des idées
à monsieur Darwin et madame Dieu
je les ai vus dans la cabine de la plage
redessiner les branches à leur image
oui, celles là. 
 
                02-03-2001
 
    -- Le coeur d'un chat sous la vitrine --
 
 
Allées rondes et carrés de tissu
je marche avec mon chat dans la rue
le long de ces grands récipients à femmes
gouttières à beaux drames 
 
Les vitres offrent du sable pour les étapes
je bois les robes balancées dans leur berceau de verre
leur lente mélopée sur sillon vif
la peau le vent les reflets la mer
le soleil mélange un peu tout ça en moi
je presse le pas
 
Plus la pierre est grise et plus il fait doux
j'aime me lancer de carreau en carreau
un chat posé sur le creux du dos
et mes mains de bas en haut
j'ouvre les reflets des portes poitrines
sous les aréoles des vitrines
 
Petites lunes en fleur
les robes rêvent en rougeurs
elles plongent s'enfouissent dans leur bois tendre
et tirent sur leurs jupes à joie sensible
je les connais ces fontaines à fruits
elles font du bruit
pour qu'un océan les embrasse par surprise
 
Mon chat prétend que les robes rendent fou
si on se met à rire dessous
mais lui si on l'écoutait
on grandirait longtemps sous leurs ombres câlines
et on interdirait les corps couverts
même en plein hiver
 
02-03-2001
 
 
 
    -- Brume à belles bulles -- 
 
 
Au quatrième tiers du printemps
je virevoltais encore
cheval ailé sur la piste de mer battue
cour cinglée de lèvres
masque à moitié nu
 
Mon numéro de femme fumerolle
montée sur des baisers salés  
ça ne te suffit pas ? 
tu poses tu poses
des questions les unes dans les autres
j'en aimerais presque cette vie
et ses traces de sabots sur le bas du dos
 
Pourquoi les livres n'enseignent t-ils pas
les gestes qui sauvent
en cas d'accident de jardin ?
 
Corps sans réponse
j'ouvre les mains
comme pour recevoir des soleils en balances
lancés du balcon équitable
 
Je pèse cette plume à crier
sur un certain grain de beauté
océan légendaire
belle eau brune traversée d'astres roses
cosmos à toucher du doigt
je descend jusqu'à terre
le long de cette liane révélée sans indices
 
Tendre génie de la première goutte
j'ai souvent frotté notre lampe à berceuses liquides
on vient toujours de très loin
rois et reines soudés dans des carosses encordés
assister à notre amour
sans filet
sans eau dormante
sans mort
 
Sous tes poignées de riz bleu
ma peau revit tu sais
rimée rentrée ressucitée
ne t'y trompe pas
ma douce fléchette à coeur joie
j'aime respirer de tout mon large
cette noce aux mille anneaux épicentres
sans barreaux rouges aux fenêtres
j'aime respirer en chevauchée
dans ta brume à belles bulles
 
        01-03-2001
 
 
 
 -- Elle est passée à travers moi  --
 
 
Tenté d'aspirer les virages
puis curieux de ce ventre à direction assistée
- jusqu'où peut-il tourner ?-
je laisse l'échancrure bien équipée
me garer dans la plus parfaite dignité du désordre
je signe à la volée
quelques faire-part de brisures
mes mains cachées sous un placard
 
Sans faire l'amour à la bassine
je m'en irai fouler l'or sauvage
dans le sexe de Camille Claudel
celui du creux de ses oreilles
aujourd'hui je connais mon emploi du temps
flotter sur une mare de sang noir
puis sauter sauter du lit vers la vie
coiffé d'une auréole à cornes
 
Ange souillé d'aiguilles
aux nombreuses vies greffées à des draps creux
jeté sur un corps sans visages d' heures
mon sablier survit à l'effritement
en attendant l'heure du dîner 
celui qui crie dans le frigidaire
 
Cordes à croquis
mes palpes gribouillent l'autre côté du coeur
sous la palette de la bave du soleil
j'y ancre ma tendresse à rustines
en fier enfant d'un cloître et d'un nuage
j'ouvre par le milieu
la douce poupée de mousse anthracite
 
Laissée sur la pelouse poitrine par des lunes herbivores
contre-venins d'expéditions punitives
elle est venue relever les indices des urines
entre mes mâchoires unies pour la vie
elle a brisé les bras des fossés
ta volée d'épines
elle est passée à travers moi
 
                01-03-2001
 
 
 

"Il est si facile de perdre la mémoire de soi-même"
-- Henrik Ibsen
 
 
 -- Une fois par semaine, je me souviens de moi --
 
         
        Une fois par semaine    
        je me souviens de moi
        je retrouve sous mon oreiller
        les billets d'avion que j'avais imprimés
        pour les lire à mon réveil
        je ne sais plus où j'étais
        y avait t-il une ville aplatie de soleil
        un marché peuplé d'ânes  
        se transmettant le poids des épices
        par tradition orale 
        ou de larges avenues trouées de confetti
        et un parc où se donnait une grande fête
        en l'honneur de ma visite ? 
 
        Il me revient sous la langue
        un glissement de manège 
        un tremblement de poitrine
        des visages les uns au bout des autres
        ils balisent ma route en chute libre 
        la terre me prend dans ses bras
        autour de moi une foule se presse et se dispute
        au sujet de l'angle que fait mon corps
        et puis plus rien
         
        Je lis quelques solutions possibles
        dans les douleurs que j'ai oublié d'éteindre en tombant
        puis je m'entraîne à pleurer
        à plusieurs vitesses différentes
        pour déterminer 
        laquelle est la plus adaptée 
        au mouvement de la terre
        et en multipliant la rotation des pleurs
        par la pression de ton souffle sur mon coeur
        j'arrive à nous retrouver
 
        C'était l'hiver
        sous un ciel gris souris
        je marchais
        très soucieux du soleil 
        et de la composition des bouquets d'avions
        à t'offrir en plein vol
 
        Bientôt
        j'aurais déjà tout oublié
        je retomberai 
        exactement dans la trace de notre prochain pas
        je t'ai croisée
        un billet blanc serré dans tes mains
        une fois par semaine je me souviens
 
                28-02-2001
 
 
 
 
  - Ne dis pas à la pluie qu'il pleut --
         
 
Soeurs sillons
petites lettres de saveur 
les gouttes jouent en légère diagonale
à qui est le plus bas dans la terre
 
Qui a cassé les couleurs ? 
le soleil est fermé 
s'il te pluie dessine moi une odeur 
l'entrée est dans la clé
la clé dans une goutte d'abeille
l'abeille sur tes reins
tes reins sous mes lèvres
mes lèvres juste au bout de ta langue
 
Grange à étoiles
tu te promènes en vase ouvert   
il fait feuille
un arbre se penche
pour boire au creux de ton cou
l'eau monte en toi à hauteur du coeur
        
Corps fragile bordé de cils
le vent caresse la coquille fleur
        
Vue d'ici en bout d'ailleurs
cette eau riche en ciel
donne des sésames de pesanteur
plus légers que des ailes
le destin triche le long de ma peau
il fait beau sur mon dos
 
Ce ruisseau rebondit de bras ouverts
la paume pluie applaudit
                
Tu peux brancher la prise à paradis
Mais si tu veux que ce jour reste bleu
ne dis pas à la pluie qu'il pleut
        
        21-02-2001
 
 
 
 
 
 "Dans les ruisseaux des formes en or m'enchantaient. Pourquoi hésitais-je à faire
couler sur ma toile tout cet or et toute cette réjouissance de soleil ?"
(Paul Gauguin, Noa-Noa)         
 
 
                    -- Hititau * -- 
 
 
Suspendus au sexe des poissons
trois oiseaux sont nés
par la fente de la mer brûlée
leur langue dressée sous les écailles
 
Tu roulais t'effritais mourais
sur les reins durs du soleil épuisé
l'oiseau-gifle volait quelques gouttes au lagon
il faisait pleuvoir les radeaux brillants
trois pièces jetées du paradis
pour les chasseurs d'esprits
 
Tu jouais
petite mort vanille 
tu portais ta robe sous sa peau
 
Requin nu ruban noir 
corps libre lacé dans ton corps
l'ambre chauffée soufflait le chant cerceau 
cendre rougie de la mousse déchirée
la magie du magma mouillait la fronde à jouir
détachée de l'écume sorcière
son lait imbibait ta moelle obscure
l'animait de levers de marelles
et l'oiseau-lèvres traçait les ronds de paroles
"j'ancre les serpents au creux des vagues
je danse le remous des roues rames
j'inonde l'étrave des feuilles enchâssées dans ton ventre"
 
Tu tissais vrombissais naissais
boucle d'encre safran 
tu glissais l'or fluide entre les jambes de la plage
à petites crues d'implosion
l'oiseau-rêve lêchait les nervures douleurs
et dans les serrures sous les pétales
avec trois gémissements d'avance sur le fermoir des hanches
la nuit buvait déjà l'empreinte de l'aube
 
                
        17-02-2001
 
 
 
* en tahitien, "instant qui précède l'aube".    
 
 
 
 
 
 
 
 
"Mez'a e cose finite
mez'a e buchje vite
passi di ultimu usciu" *
(A Filetta)                     
 
                   -- Chatières --
 
 
Dans ma maison il y a une chatière
pour que tu puisse entrer
sans passer par l'enfer
et sortir sans te mouiller les pieds
 
J'ouvre mon petit panneau de paupière d'eau
comme un livre sur lequel essuyer tes mots
 
Dans ma main, il y a une chatière
pour que ta main puisse la traverser
sans être gênée par ma peau
ni tomber dans mes signes en serrure
 
J'ouvre tes doigts vidés de vol
leur danse comprimée sous le sommet du sol
 
Dans mes yeux il y a une chatière
pour l'évasion de la lumière
quand tu viens bleuir mes feux d'homme
avec ton ventre allongé sur le dos
 
J'ouvre les cils entre tes jambes
comme un visage prolongé de pinceaux
 
Dans ma chatière, il y a ta chambre de silhouette
encre pleine au milieu d'un corps vide 
rien n'y entre pour que tu puisse marcher
et délacer les volets des pages
 
        13-02-2001
 
 
* (Parmi ces choses finies
parmi ces vies brisées
pas du dernier seuil)
 
 
 
-- Peuple aux poings percés -- 
        
        
        Ils portaient devant leurs yeux 
        de hauts verres de frontières  
        et des fusils à balles bleues
 
        Mes mains poussaient la nuit
        je les tenais à bout de cris
        je gravissais leur sang à flanc de rumeur d'ombre
        trempé dans leur bûcher d'eau
        et mes doigts s'écorchaient sur les prières des tempêtes
 
        Juché sur ses entraves
        j'ai trouvé la mer belle
        
        ils se désignaient hommes
        faits de longs bois d'épaules en friche
        nouées dans leurs guérites
 
        Le vent bouclait les cordes ancètres
        l'eau bourdonnait de chevelures 
        leur granit volait comme des lèvres d'ammonite 
        leurs silhouettes sombres maintenaient le monde en place
 
        Au soir d'imbiber le sel 
        j'ai desserré l'étau des vagues
        
        Ils claquaient de sang contenu
        leurs torses rouges forgés dans le soleil marteau
        ils dévidaient tout un peuple de voix claires
 
        L'or chaud du ciel 
        mouillait mes bras dans la terre
        mes mains couraient devant moi
        longeaient ce pays d'hommes aux poings percés
        pour aller leur cueillir la plus haute fleur de la mer
 
 
                        13-02-2001
 
 
 
 
 
à S*.
 
 -- Quelques gouttes à essaimer le soleil dans les draps --
 
 
 
        Rondes à oxygène
        j'ai tracé des cercles d'eau dans les draps
        mes mains sont des lettres bleues
        bercées d'arrière en avant
        accroupies sur les plis blancs
        comme sur des bancs de tissu vivant
        regarde la soif de la lumière bue
        à travers ce mouchoir à naître debout
 
        Mes lèvres sont des essaims de carmin
 
        Manège à deux places
        ma vie se retourne tout contre la tienne
        toute douce
        chaleur d'un miroir de mousse
        pendant la nuit entière
        j'ai dansé des ronds de sorcière
        aime moi
        à l'envers de la poussière
 
        Lequel de nos ventres bourdonne comme une abeille ?
        
        Brins bleus en oreiller de jeu
        tes doigts chauds ont un peu d'avance
        sur les boucles de mes cheveux
        ils touchent déjà mon épaule
        ils frôlent 
        des feuilles rondes qui font le tour du monde
        viens les embrasser
        et je deviendrai un fantôme en couleurs
 
                        6-02-200
 
 
 
 
En co-écriture avec Florence Noël
 
1-3-5-7 : Steph
2-4-6-8 : Flo
 
 
         -- Huit soleils sur la table de la nuit -- 
 
 
L'encre déshabillée par le premier soleil
est un pépin sans fruit
ombre cursive
elle arrondit
la poussière qui fume dans la chambre sêchée
  
Dans ta paume
la lampe encore inerte tourne
au mitan de la cendre
quelques glaçons heurtent
le second soleil 
 
Fils à lèvres
les étoiles marchent entre nos mains
le troisième soleil étreint les cordes
et le chant des éclats
plie le ciel en coupures de seuil
  
Gommé dans le fusain 
safrané de copeaux 
le quatrième soleil 
crayonne
le visage des falaises.
 
Le cinquième soleil est une riviere assise
amoureuse
elle serre le vent fluide sur sa peau
ma lettre de cailloux ronds
feu soufflé dans son eau
 
Un cyclone dépose ses spirales
sous le nombril du jour
le sixième soleil se rendort
roulé dans ta main 
  
Roue ancrée
sur des lamelles d'or
une femme en terrasses
étage ses osmoses
jusqu'au septième soleil
 
Là où ses ocelles cambrent leur trame
en conjonction de caresses
le huitième soleil glisse sous tes doigts
puis transmute l'heure
en satin.
 
        23-01-2001
 
 
 
 
 -- L'idiot du visage --
 
 
Rhume de ciel
Les fissures
courent sur les arêtes des poissons-murs
sel magenta
noir brûlure
 
J'ai rattrapé vos yeux à la course
miroir cyan
mouroir à deux temps
 
Rose de chambre
quelques grains de poudre bleue
dans l'encre des cheveux 
 
Et tout ça fait des petits mots
l'idiot du visage les distribuera bientôt
dans des enveloppes à fleur d'eau
 
        
                5-02-2001
 
 
 
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