Pour aller vers l'avenir, cliquez sur la flèche vers la page poésie numéro 19
"l'arbre parle arbre comme l'enfant parle enfant" -- Jacques Prévert --L'arbre à l'enfant-- Enfant au milieu de l'arbre. Un sourire agite ses feuilles. Puis un rire de salamandre court à travers le feu frais du mouvement vert. La nuit, les oiseaux se guident aux éclats du chant de la lumière qui rit en vert. Le jour, l'enfant à l'arbre garde les plus fatigués dans sa paume. En les caressant, elle écrit une lettre sur leurs ailes. Oiseau par oiseau, une phrase passe devant moi en volant. "Tu tournes autour du tronc pour le lire. Si tu continues, tu vas te vriller dans la nuit et le jour ne se lèvera plus jamais dans ta tête. Moi, je ne crois pas que l'histoire d'un livre soit sur sa couverture, je ne crois pas aux dessins des couteaux sur les arbres. Il faut les lire du dedans". J'aime beaucoup le mot "nuit" écrit sur un rouge-gorge. Il faut beaucoup d'oiseaux pour dire tout ça d'un coup. Enfant de cercles sombres et clairs, elle tourne autour des anneaux noirs et blancs, dans le tronc du temps. Je sème des champignons en forme de points d'interrogation et j'écris à mon tour. Puis je pleure un peu, mais juste pour qu'ils poussent plus vite. Chapeau par chapeau, une phrase surgit de la terre. "Mais comment va t-on à l'intérieur d'un arbre ?" Elle soupire. Un vent s'enroule aux branchex, elle le prend dans sa main pour le modeler en forme de nid à respirer, où se poser, les jours fatigués. Le jour où les oiseaux manqueront d'air, ils viendront respirer dans les rouleaux du souffle en brins. Sur une brindille, elle grave juste quelques lettres. "Facile" Elle fait onduler les branches, jusqu'à ce qu'elles bleuissent, deviennent des vagues, jusqu'à ce que les embruns des feuilles me redonnent la mémoire. L'intérieur d'un arbre est le creux d'une vague. Les feuilles éclaboussent. Dedans, l'enfant de l'arbre arrose des visages d'eau avec de l'herbe en pluie. Rouge comme le rouge-gorge sur lequel elle avait écrit "nuit", un oiseau se penche pour faire gouvernail. Son sillage trace un mot dans l'eau, un mot que je ne dois même pas écrire, car si ce mot prenait forme, les feuilles ne tomberaient plus jamais à l'automne et même les lames des couteaux embrasseraient les arbres. En frottant ses doigts sur l'écume, elles allume les visages d'eau d'étincelles de sel, pour écrire dessus. Goutte à goutte, les visages disent le chant crépitant. "Crépiti-crépita, la vie ainsi va Dans l'intérieur d'une blessure, il y a un baiser Sur le fil d'un couteau, une corde pour marcher Dans les branches d'un arbre bruisse une enfant Dans le creux d'une vague, assise en rêvant Dans l'océan d'un oeil, Croissent les larmes à faire pousser les feuilles. Dans l'écume de la sêve roulent des verts À faire voler la mer Crépita-crépiti. ainsi va la vie. " Et une vague verte me lance depuis le pont. "Un homme au ciel" écrit le rouge-gorge sur mon sillage vert dans l'air. Puis je rêve longtemps, dans le sens du courant, je dors chantant, comme l'océan au bois dormant. Assis sur une vague, je regarde une enfant bruisser en approchant. Je vais rire tout vert pour qu'elle tourne la tête et, le temps de lire quelques rouge-gorge, attendre que l'eau monte, pousse bleue par pousse bleue, pour qu'elle puisse marcher sur la plus haute feuille de la mer. 25-03/ 27-04-99
" "Aux sombres héros de l'amer Qui ont su traverser les océans du vide" -- Noir Désir -- Chemin faisant -- Chemin faisant Tu racontais le vent Comme il bouge Comme il devient rouge Dans la nuit Les trous blancs des voiles Écopent le ventre des vagues Au soleil Tu racontes les brûlures de la pluie Pour faire glisser les femmes Pour faire tomber les nids Dans les fractures des âmes Le langage des nacres Les îles raides Les vents cadavres L'odeur de la poudre Le revers de la foudre Les âges les gouttes les tavernes Ce que boivent les morts Tu sais tout À marée mentante Du fond de ta tête Sont montés les monstres les merveilles Le poids des bulles La langage des abeilles Les crevasses du soleil L'or tombé dans ton filet La pulpe des crochets Mâchoire en marche Quelques pas juste le nez dehors Et le chant des vies mortes Devant derrière autour Et tes bras s'agitent Gestes à vider les ombres Pour singer les étoiles Enrhument l'espace De tant bouger de vent Mains vides Dans la nuit Personne Des rêves en caisse Des poils de lune Du sang au bout d'une laisse Mais la vie s'invente Toute seule Chemin faisant Le vent te racontera 27-04-99- Toile de naître --
Course des feuilles rouges Frôlement couleurs épaisses Nuances haletantes Pression vivante Corps trempé dans la lenteur Horizon sans herses Un rire à l'envers de l'orage Tout un ciel à remplir Aux radicelles des ailes Petits sauts des couleurs Sur une toile de naître 21-04-99-- Lignes de nuit --Nuit en sursaut Faisceaux d'encre Une chanson monte Orage des mains Au visage du papier Un rire joue Visage des notes Libres de mordre Un souffle brûle Feux choisis Des lignes de nuit Un cri rêve 21-04-99--Houles de gare-- Dans les houles de gare Avenirs du bout du monde Sandwichs à la mémoire Des oiseaux dans les valises Des mains qui agitent les quais Leurs couleurs sourient à tout le monde Dans les houles de gare Des sourires balaient les larmes C'est la mer qui prend le train 21-04-99-- Les filles du carillon --
Les filles du carillon sonnent au bout des branches. En chantant, elles annoncent un autre temps. Pliées dans la pluie, elles entourent chaque goutte de trilles luisantes, cognent sur le verre posé sous le ciel. Quand elles se souviennent du vent, les oiseaux du bout des arbres respirent. Parfois, quelque chose dans la nuit fait peur, et les oiseaux se referment. Il n'y a plus rien à chanter, plus rien que des poings froids, serrés sur les yeux du jardin. Et la peau de la vie, si fine, se déchire dans le noir. Puis le carillon crie et les arbres du jardin ouvrent clair leurs oiseaux. Ce sont des rouge-gorge, des brûlures pépiantes, leurs ailes sont des longues lèvres peintes qui picorent la vitre du haut, mordent le verre aveugle. Leur souffle hausse les notes des filles, hérisse le jardin, brise enfin le verre au dessus de nos têtes. Transparence au bout du bec, un souffle se reflête, s'absente de l'oubli. Et les éclats des filles rient en entier. Maintenant, elles peuvent marcher. Chaque éclat qui tombe referme une blessure et ouvre une bouche dans la nuit. Sous les sourires des becs, sous l'arche vive de la chanson du carillon, le jardin embrasse leur chemin. Elles déplient leurs doigts-pinceaux, s'affairent à peindre des gestes sur leurs cils et des yeux sur les oiseaux du bout des arbres. À l'aube, elles s'en vont poser des maisons douces sur les plaies du jardin. Tournés vers elles, les yeux des rouge-gorge font brûler le temps en roulant les couleurs du carillon sur les brins noirs de l'herbe de nuit. Les filles du carillon peignent l'horizon sur le bout du jardin pour infinir le regard des branches. Les arbres peuvent enfin s'élancer et voler. Suspendu à l'arbre par une chanson, le carillon va maintenant fabriquer des garçons. 18-04-99--Rose du vivant-- Une fleur pousse un cri sans tapage La nuit tombe Dans un flacon de parfum En ressort muette Les pétales du vivant ont chaud dedans Près de toi Les mots de la rose Te parlent en vivant 13 avril 1999
-- Robe de vanesses --Le labyrinthe m'enseigne. Pulpe de papillon, les touchers de lumlère dans l'air prolongent son tracé. Il faut alors prendre le virage volant, tourner vers le haut. Bouquet de pas, je lâche les ailes des carrefours. Les regarde s'envoler, rire de briller, reflets enflés par les larmes. Cieux qui riment, les vanesses savent les couleurs vives, frottent nos yeux l'un contre l'autre, fleurissent les appels, font défiler des ors bleus en robe des chants. Des fenêtres s'ouvrent dans le froid et nos yeux retentissent, leur rire tinte en courant. Tu chantes en clé de scie, fais faner les cages, mes oreilles lèchent ta voix. Dans le labyrinthe des cris caressent l'intérieur du temps. Frissons de couleurs, les sursauts épars se rassemblent, forment un seul mot sur ma peau, dressent le corps de l'eau. Extrémité du toucher, j'entoure la danse des vanesses. Le labyrinthe saigne. Un éclat de source fiché dans l'écoulement du soleil, j'habille les ailes de rouges charmants. Des coupures dans les mains, vertige des lignes de vie, s'ouvre la paume du pas suivant. Je souffle des ailes pour guérir, laisser s'envoler les vanesses blessées. Tu sais vivre en frôlements, dans l'épaisseur des angles de lumière, tu lèches tes ailes, lisse la poudre des pétales, argile incandescente. La lumière anime les dentelles, et les fenêtres d'ombre dansent en tissus de vanesse. Doucement, je te respire. Tu vois à travers ce qui brûle. Les vanesses crient à feu doux. Labyrinthe de soie, l'élégance du mystère interroge à beaux plis la robe digitale du plus-que-vivant. Ses caresses se noient, ses cris débordent et il faut encore monter pour avoir pied. Ne pas se retourner, sous peine de se courber. Le labyrinthe se baigne. Des ailes embrassent l'intérieur de mes mains, frôlent l'intérieur des chaleurs. Vert mlei, nervures glissées au pinceaux du vent, sève tournante des tiges solaires, la sortie est dedans. Il était temps. Au dessous de moi, déjà, les couleurs mangent les coeurs. "La beauté nous tue jusqu'à notre première naissance" lâche le maître du jeu, puis le vent courbe sa voix, enterre sa bouche. Maintenant, la mort manque d'air et s'enfuit en criant que l'amour la brûle. Naissance en escalier, je ris de tout comprendre. Une vanesse déplie ses yeux. Un feu de papillons souffle sur la peau de mes gestes plus hauts. Vibrations. Tout autour, le frôlement d'une robe de vanesses. 07-04-1999-- Période fauve --Pétales de vitrail Mes paupières mordent la pluie Feu de papillons Liserés de carnage Coups à plier les visages Coeur en cordée de lions Née à double tour Fleur plantée dans un cri La vie bondit 03-04-99
-- Nuage en couleurs -- Tournoie la chanson des chutes L'écho d'une vie en une minute Drôles de petits avions Drôles de notes qui se jettent Et la falaise les répête Même quand la marée s'arrête La mer se souvient des mots De la chute qui danse Et de l'écho du silence D'un cri pris en photo Noire et blanche La vie plonge Et des soleils poussent dans l'eau Et la couleur lave tout jusqu'en haut 25-03-99"Soleil ! sors de ton trou, casse le couvercle, frappe les brouillards, mange la nuit, dissous le noir, montre-toi, montre-nous le monde, montre-nous au monde," -- René Daumal -- Esprit du printemps -- Mortilège, je danse contre le mur, creuse la pierre de l'ombre d'un mouvement, puis je pars et l'ombre grimpe le mur, saute en couleurs, Passeur de frontière, je vole par dessus les chiens. Venin d'or, peau frappée du sceau des vivants, langue de lumière, je ris en fliet d'ambre le long du mur, Je suis venu tuer l'hiver, piquer un bâton de feu dans son corps blanc, faire flamber ses cristaux en marées visionnaires. Flamme hirsute, sourire de lumière, je viens lêcher vos tiroirs, chatouiller l'envers de vos robes, polliniser vos rêves, Vivre ! Aimer ! Et courir, courir, jusqu'à faire flamber l'air et enchanter nos souffles. Fleur du dedans du temps , mes graines sont vos visages. J'aime vous voir flotter dans l'air, rêver que vous vivrez encore demain. J'aime les ailes de vos lèvres et tous vos bruits d'abeille. Je suis là depuis la veille du monde, mais lorsque vous aimez, vous m'inventez. Danse de la tige verte, je viens lever vos jardins et ployer vos cous tièdes. 19-03-99 ---------------------------------------------- Que le printemps vous soit vivant, dansant, fourmillant. On ne révolte que ce que l'on s'aime ;-) Amitiés toujours. Ziggy Stardust/ Stéphane Méliade"car un même cordon solaire nous relie comme eux à la clarté régénératrice. Nous descendons tous du soleil ..." -- Saint Pol Roux -------------------------------------- -- Ides de mars -- Au bois de la vie noire Les sabots du soleil Coeur en allée cavalière Cris nièrent Cavalcades déchiroir Battement de la terre passoire Noeuds opaques Craque Le corps gelé De l'hiver défoncé Plexus solitaire En trouées de lumière Pour voir à travers 19-03-99"Le vert fut la couleur premiere Dont les yeux furent enchantez." -- Tristan l'Ermite-- Verte la vie --Blanc brûlé Ombres en couleur Rouge abeille Piqûre de fleur Noir bonheur Ronde vivante Mord la liberté Pluie sur parasol Danse piquée Pivoter ou tomber Saut de l'encre Saisons des puits Cadran lunaire Belle la folie Verte la vie 18-03-99"L'océan la fleur et le cri du coeur au loin voici voici voici le murmure des vitres brisées" -- Robert Desnos ------------------------------- -- Pousses de miroir -- Surface de labyrinthe. Teintes de toi diffractées, éclatées. Plaies de couleur, tu regardes. Ciel vertical, tu poses tes mains et multiplies les regards, tes doigts s'agitent en roue plate de gestes à faire la poussière. Montagne de toi-même à gravir, tu pleures des larmes qui tintent, t'essuie dans un bruit de vitres reniflées. Cercle fermé de tes mains autour de ton regard, tu ne te vois pas faire signe, t'entoure de ses propres bras, bute sur la frontière. Lisse comme le verre, ton corps perd ses arêtes, devient psyché ronde, scintille en aveugle. Tu te tasses et la glace grandit. Facettes de vision végétale, croissent les pousses de miroir et s'étend le reflet de la nuit. 18-03-99-- Kaput Cino --
Plongé dans la lueur du café, je brûle toutes vitres baissées. La fumée saigne dans l'aube. Illucinations, les ailes en fleur clignotent sous l'avion. Halluminations, l'éclat nègre des poings brise le son. En secret, une main gauche glisse une lettre dans une main droite. Puis l'oubli efface l'encre. Il faut torréfier un nouveau coeur, faire chauffer une nouvelle lettre. Kaput Cino. La poudre déchirée fait violence au sommeil. Volutes qui me couchent et me dressent. Sucre blanc dans une nuit noire, 17-03-99-- Prononcer la lumière --En haut de l'eau, une petite fille se bouche les oreilles pour écouter son coeur. Née de la nuit, fleur de givre et d'ombre tiède, tirée par des papillons d'or, elle monte, monte en fièvre volante, Le jour la saisit, attrapeur de vagues dans un filet de ciel. Une larme remonte à sa source, coule dans mes yeux, voyage jusqu'à l'extrème centre de la nuit. Flammèche de saphir au dessus des cheveux, ta couleur regarde. Au fond du soleil, une petite fille ouvre les yeux pour regarder dedans. Enfuie du jour, soeur de foudre et de chant vif, emmenée par des lucioles noires, elle plonge, plonge en musique tournante. La nuit la libère, envoleuse de flammes dans une coupe de silence Un rire éclot au delta des gestes, flambe dans mes mains, part dans le jour, jusqu'au milieu du bord. Prononcer la lumière. Dans la paume des mots, la rosée de Saturne. 17-03-99- La nuit crie de nous avoir griffés ----------------------------------------------- -- Choses de couleur mouvante --Tu cours, ta crinière en drapeau d'encre, tu cours dans les couloirs du train, renverse les fenêtres, fais couler entre ets doigts le trait du paysage, dehors. Je te vois, tu cours, tu conduis le train, la nuit, la terre. Ta main passe au travers de la vitre, plie le paysage en origami. Toi seule files à travers le monde qui ne bouge plus. Tu fais l'origami en forme de bateau, le lance dans le couloir. Il flotte sur le nez des voyageurs, masque d'enfance, crème blanche sur ta peau de charbon d'or. Autour du train, la terre s'aggripe au mouvement, le sommeil à la vitesse, tes mains au ciel vitré. Debout sur le siège, tu ris le train enroulé sur ton cou, écharpe de cris autour de toi. Un train à la mer. Les ongles des vagues griffent les yeux du papier. Tu ouvres et fermes les yeux pour changer la couleur du train. Il rit et file plus vite encore, arc-en-ciel de métal. Chevaux des reins, tu cours dans les couloirs, pliée dans le ventre du papier, tes doigts écrivent sur la vitre. Chats de mer, les autres dorment tous en boule, la tête hors de l'eau. Les gens dehors regardent les mots courir. Tu sors un cahier de l'intérieur de ta main, écrit les Instants à brûler, les lignes à mourir de vivre. Cordées de sang, tes mots font les gestes pour laver la nuit. Craque une sève, s'allume un doigt, flambe un souffle. Le train orange, lancé comme une larme de feu. Les mots filent à la vitesse d'un cri. Les mots sont si rapides Un train fait l'amour à la nuit, loin, profond, crépite à l'intérieur de toi, creuse des tunnels dans l'ombre. Maintenant, les vitres du train sont couvertes des feuilles de ton cahier. Goutte vivante, ta peau brille sur les vitres. Puis, quand la gare rentre dans le train, tu t'endors, pliée en origami, pendant que s'ouvrent les portes dans le papier. 16-03-99- Coucher d'oiseaux --La lumière vole de plus en plus près de l'eau. Tout autour de la terre, les ailes se rapprochent. Soleil volant, les rayons de la terre sont des ailes. Et l'eau attend l'heure du coucher d'oiseaux. Leurs ailes dépassent de chaque côté du soleil, et les légendes disent que le soleil descend se poser ici pour passer la nuit sous la mer. Ils s'attardent encore un peu dans sa chaleur. Ils attendent qu'il touche l'horizon, passent un instant la tête de l'autre côté du monde, sous la ligne, sous l'eau, puis sortent nager. Les oiseaux du soleil aiment rire au fond. Pays de toucher frais autour de soi, pays d'ailes douces aux lents anneaux de caresses. Ciel qui pése sur soi. Lumière vaste qui se resserre. Profondeurs d'amour traversées de courants chauds. Soleil d'en dessous, les oiseaux chantent. Leurs plumes éclairent jusque dans les laves noires des fonds. Ils chantent un peu sous l'eau, au moment où elle commence à se prendre en nuit, plus épaisse, plus vaste. De goutte en goutte, leur voix font le tour du dedans de la mer, comme le soleil a fait le tour du dessus de la terre. Leur chant enflamme les vies d'ombre luisante, fait danser les fauves mous et lourds qui rampent entre les rochers, ondulent sous les notes. Lestées d'amour, les flammes du ciel offrent une arche d'été aux abysses. Sous la mer, le soleil est une voix et la lumière un chant d'oiseau. Les créatures de la mer comptent les heures en pépiements de lumière. Puis, remplis, les soleils volants s'arrachent enfin des fonds et surgissent au dessus de la ligne, laissant le feu descendre plus bas encore, vers le noyau du monde. Au dernier instant du jour ils en ressortent enfin, leurs plumes mises en relief par la lumière de ce moment précis, ni de nuit ni de jour, mélange entre l'envie de l'ombre et le souvenir du soleil. Le soleil coule et les oiseaux montent, leurs ailes trempées de la nuit d'eau, leurs chants gonflés d'avoir donné du jour à entendre au peuple d'en bas, jusqu'à la dernière profondeur de la vie. Ils ont pris la teinte du fond de l'eau, là où la lumière pèse, là où la vie tremble en cercles phosphorescents. Les oiseaux pleuvent vers le haut. Lorsqu' avec leurs ailes ils ont bien mélangé les abysses au ciel, ils replongent en traits vibrants, faisant siffler l'air, créent de larges coupes dressées en touchant la mer, fleurs vivantes au geste bref. Ils dormiront au fond jusuq'au prochain soleil. La mer respire de plus en plus près du ciel. Au centre des rayons d'ailes, la terre se repose. Soleil profond, les chants du ciel sont le réveil d'en bas. Et la nuit attend l'heure du lever de l'eau 17-03-99-- Tombées de vie --Sable fou, une montagne raconte qu'un jour, elle sera légère dans une main d'enfant, volée d'or et de fièvre, compagne de course et de rêve. En poudre de torrent, elle sémera du feu dans les yeux des vagues. Un arbre monte, traverse mes mains, écarte mes bras, me transforme en geste de feuille, signe amarré au courant. Je suis cette forme sombre aux mouvements patients, je suis cette nuit rêche que caresse la lumière, je suis cette eau luisante aux nervures de chaleur. En ces temps de croissance, il n'est ni eau tranquille, ni forêt morte. Sable fou, une plage raconte, en dansant dans le vent, qu'une nuit elle sera massive et lente, que ses arêtes seront des joues de vieillard, des gestes de peu au souffle court. Le vent s'épaissit, mêlange la tourbe au cristal. Je boirai le second et me vêtirai de la première, pour être chez moi de tous les côtés du temps. Flamme qui tousse, je guérirai les arbres du froid. Eau qui brûle, je soufflerai des vents d'étincelles. Craquements de la mer. Les racines fluides courent dans ma tête, gonflent les marées du bois, cerclent mes mains en sourires d'années. Vent couché, un courant flambe. Vague debout, un arbre monte. Aux grandes profondeurs du ciel, en tombées de vie, j'entends le premier souffle des troncs du soleil. Mer obscure aux noyaux de flammèches, je sème les gouttes des feux passeurs. Ligne du sourire d'eau, Crépitement des feuilles en incendie bleu, je conduis la nuit vers la couleur. Un jour de ma vie, je toucherai la plus haute branche du ciel fluide. Feu palpable, l'arbre de houle est du bois dont on fait les étoiles. Sable fou, jusqu'au dernier jour, le soleil viendra crier dans la mer la joie de gravir les grains jusqu'au fond. 08-03-99-- Éclipse d'ombre --Simplicité composée des mouvements nuages L' écho des courses en ciel Tourne les yeux vers le soleil Ombre sur les hommes en couleur Chat à côté de moi L'ombre se ramasse pour bondir Griffes sur le soleil Jouer La gravité des vérités Oser briller Boucles Écriture vivante Chatoyer et signer Pinceaux goutte par goutte sur le ciel Coeurs couvercles Nuances dans les marmites alchimies secrètes Le temps d'une palette De l'intérieur Rayonne le noir couleur qui repeint l'incendie Vibration des pinceaux trempés dans l'air d'été Battement de paupières Rayons des coeurs habités de couleurs Le monde prend feu aux yeux Éclipse d'ombre Au centre de la terre, le soleil regarde en l'air04-03-99-- Bain de minuit -- Nuit dans la nuit Les nageurs brillent Feu en face du soleil Souples dans leur main Des petits bouts de nuit Sans partir sans mourir S'agrippent à l'aiguille des heures À minuit Nervures d'oasis Delta de la lumière irriguée Tournent les piqûres dans l'eau claire La rivière brûle Cercles des flammes venues se baigner Goutte de soleil sur peau de fleur 04-03-99-- Les noyés --Ils remontent. Sans bouger leur corps, ils avancent, toujours plus près de la lumière, toujours plus lancés vers l'air. Deux lumières douces et nacrées dans chaque visage. Deux lunes d'eau dans les yeux. Parfois l'eau en a rangé un sur l'autre, en travers. Une croix tourne en montant. Ils arrivent. Sous l'eau tremblent d'étranges couleurs, portés par les visages s'approchent des éclats vibrants. Un grand vitrail de nageurs endormis. Remontant goutte à goutte une longue fleur de patience, pétales fluides, effleurent déjà la ligne entre les deux mondes. Ils surgissent. Les hommes tendent les bras vers la surface. Tendent leurs doigts vers les yeux pour saisir ce qui brille. Mais les noyés continuent vers le ciel. Accrochés aux regards, quelques hommes suivent un instant, puis retombent. Les noyés s'envolent. Sans mourir, ils s'élèvent, au dessus du vent, autour du soleil, plus loin encore. Dans leurs yeux, la lueur nacrée brille toujours. Le rêve d'or et de nuit, la soie rieuse, la Lune de Mer qu'ils sont venus chercher, à l'envers du fond. Chuchotis de lumière. Ils l'ont mise dans leurs yeux Leur regard respire en toute vie. Ils voyagent avec elle pour la rendre au ciel. Déjà, quelques enfants ont compris et respirent sous l'eau en riant tout bleu. 02-03-99Eaux et tristesses, montez et relevez lesDéluges." - Arthur Rimbaud -- Grains de beauté -- Je suis venu jouer dans la nuit, sous la neige des grains de beauté, Ils sont plus noirs qu'une montagne posée sur des yeux fermés. Autour d'eux, la nuit semble faite de milliers de cercles clairs. Ce n'est pas un ciel tranquille. Ce n'est pas un temps à jouer longtemps Le vent roule en touffes, siffle dans les brins d'herbe, heurte les fleurs gardiennes de la nuit. Leurs paumes levées dessinent toujours plus de ronds clairs autour des grains de beauté. Au dessus de ma tête le noir et le clair se soulignent. Pendant que je bouge, une neige d'ombres poudreuses tombe à l'intérieur. En moi, le clair et le noir s'entourent. La nuit fracturée meurt en soleil d'avoir dansé. Le jour vient et m'éteint. Et la paume des fleurs continue de tenir le toit de la maison du ciel, la seule dont les murs rendent libre. Je reviendrai. Dans la nuit brilleront les grains de beauté. Sur ma joue, j'aurai posé un rond de ciel. 24-02-99" (...)demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est." -- Charles Baudelaire -- La plume à l'odeur de la mer -- La plume à l'odeur de la mer ne vient pas d'un oiseau. Tendue dans le ciel, la plume flambe au dessus de l'eau pour accompagner le convoi porté par les vagues. Elle suit le chemin d'une goutte dans un coquillage. Bûcher de nacre,le coquillage dérive. Ses jeux irisés racontent le voyage d'un ciel d'eau. Sa paume salée tient le sommeil de la première goutte, celle qui inventa l'odeur de la mer. Lorsqu'il lance un éclat, la plume le voit et, aussi sûrement que le vent, l'éclat infléchit sa route. Au vent de lumière, elle prend chemin et vient rejoindre l'eau. Puis, sur les vagues, elle allume les signaux du langage des plumes, les mêches de soleil fluide. Ils s'élèvent en vapeur, se détachent du poids de la terre en marée de nuages. Alors un visage se forme en même temps dans le ciel, dans l'eau et dans la flamme. Qui saura lire dans ce visage ne mourra jamais. La plume à l'odeur de la mer ne vient pas d'un oiseau. Mais certains oiseaux viennent des moments qu'elle a passé à rassembler le grand visage. On les reconnaît à la goutte irisée dans leurs yeux et à leurs ailes en forme de vague. Lorsque dans l'eau brille le soleil de nacre, l'odeur de la mer peut gagner le ciel. 22-02-99 Ce poème est illustré. En effet, le titre de de ce texte est celui d'un dessin-cadeau de Nolwenn, dessin que vous pouvez voir à l'adresse suivante : http://www.ac-versailles.fr/etabliss/peupliers/plume_Nolwenn.html
Pour remonter dans le temps, cliquez sur la flèche vers la page poésie n°17
"