Poèmes pour voler debout
site (un peu)noir lumineux
Edition de Mars 2001
"un relevé d'oiseauest un acte impossible.
Imaginez
la profondeur des pages
et l'alchimie des crayons"
Extrait de mon coup de source : Feuilles et plumes
Histoires d'arbres et d'oiseaux, et peut-être histoires nôtres aussi, ce très beau recueil en ligne de Jean-Pierre Gandeboeuf associe en 12 tableaux, textes courts et images.
Appréciations ? Suggestions ? Améliorations ? Collaborations ?
Venez signer mon Livre d'Or :
Brindilles choisies du nid :
Les poèmes sont des corps physiques :
une interview poèmique réalisée par Juliette Schweisguth
Points d'interrogation, d'exclamation et de respiration :
une interview mots-licieuse réalisée par Marie Mélisou
Petites gouttes et grands récipients
neuf poèmes plus une souricette
Polyphonies de plumes :Traverciel, : un renku écrit avec Juliette Schweisguth Levers d'encre : poèmes écrits avec Florence Noël "Il est temps de prendre un autre thé, Alice" : 4 auteurs autour du même thé aux étoiles Echos-graphies : 6 auteurs se réunissent pour écrire autour des peintures de Florence Dervily Passeurs de lumière : "Vitres magiques, vitres de paradis" (Baudelaire) 4 auteurs posent ensemble des vitraux de mots.**Ici Stéphane Méliade. Bonjour !**
Souterraine ou céleste, la poésie est loin d'être "gentille". Sortons nous de la tête tout de suite l'imagerie du poète fragile et précieux qui écoute pousser ses cheveux en tremblotant. La poésie est terrible, belle et révélatrice. Dans tous les régimes totalitaires, les poètes sont en haut de la liste noire.La poésie relève de l'intime et de l'infini. Elle se joue de l'espace et du temps et lie les pointillés des trames. Le poète est un aventurier de l'esprit, un flingueur d'oubli, un jongleur de vie, un pousseur de premier cri.
Ce qui passe à travers nous dans ces moments là casse l'oeuf du silence. Ce qui nait alors nous puise et nous épuise, nous change à jamais et nous rend à nous mêmes.
Moi, je ne suis pas poète. Je suis juste un être vivant qui écrit.
Écrits dans le ciel, ces quelques textes pour voler debout et traverser toutes les saisons....
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Cette page est la page courante, donc seul le lien vers le passé est pérsent ;-) Sourire en avenir du souvenir ;-)
Planètes proches et pistes d'amourissage :
Les carillons d'âme de Juliette Schweisguth. Venez passer des moments avec elle, ou allez faire un tour dans son jardin aux haïkus sans coquille. A moins que vous ne préfériez effleurer ses harpes de mots sur le site du Club des poètes.
Sur le navire de Florence Noël, ne nagez pas en rond, mais souquez ferme vers l'âme de fond, à bord de la barque d'Isis. Si vous savez regarder de tous vos yeux, vous aurez le Don de simple vue et si en plus vous savez nager à corps et à cri, vous serez bien reçus dans sa maison sous la mer.
On les sent respirer, les mots de Marie Mélisou, venez toucher ses tissus de souffle et ses pierres de sève ciselée comme des joyaux de jardin. Vous pouvez aussi écouter ses battements d'encre en posant votre oreille tout contre son éditorial sur le site d'Ecrits....Vains. Enfin, venez vous asseoir avec ces étudiantes américaines qui l'interviewent lors d'un entretien d'une qualité et d'une densité rares.
Dans les textes de Mireille Disdero-Seassau, le temps est un peu sorcier. le futur tient des conférences d'orages et le passé est voyageur . Mais son cahier reste accroché aux branches, même quand le vent se lève. Et jusque sous le masque de la nuit, l'oeil du soleil est ouvert.
Les bulles de champagne du petit poisson au crayon d'or , Audrey de Sainte Maréville. Venez contempler votre reflet dans ses mots résonnants comme du bronze. Ensuite, vous pouvez aborder les îles claires et les cailloux foncés de sa mère, Laurence de Sainte Maréville, palettes doucement posées à même le grand large.
- Les fugues et sagas chromatiques d'Aaron de Najran, orfèvre sur corail. et piianiste sur vagues. Goûtez ses saveurs de poseur de fruits, puis marchez avec lui sa prochaine vie antérieure avant de vous égarer voluptueusement dans les plis de l''alcôve de Claire .
- A la fois accueillante et exigeante, la liste du carnet interdit (pour s'inscrire, infos sur le site)
- Un grand verre de cinémots au bar d'Ecrits-Vains
Textes
-- Madame, ce soir, par dessus mon épaule... -- (Sur une chanson du film"In the mood for love") Je vous devine madame au bout de l'aiguille du gramophone dans le sépia du sillon vous entrez le rideau de perles reste silencieux vous tournez sur vous-même scherzo des ronds de cire ceux de vos yeux en amande étonnés d'avoir survécu quartet de craquements du corps pour quelques piastres vous venez toujours quand je me sens seul le soir mon coeur face au mur Venez j'ai corné mon visage pour que vous retrouviez la page de mon année vous traversez mon fauteuil et remontez jusqu'au ventilateur vous montez sur les pales et m'entourez de vos mumures cela vous rappelle le temps madame ou votre père vous faisait faire l'avion dans ses bras dans un prochain passé Vous êtes sortie de l'affiche au beau milieu de votre concert d'avant-guerre Rue des Voiles à Hanoï votre robe a glissé jusqu'à terre vous seule êtes venue me rejoindre imprudente vous avez ramené un gecko dans vos mains vos yeux m'inondent et vos lèvres sont des piments rouges entrouvertes sur un lit de mirages madame vous pouvez vous étendre je vais vous déshabiller de soif Madame tout tourne les pousses de bambous vos pupilles sur le gramophone nos langues votre corps soulevé d'applaudissements votre rivière d'orage ma lente agonie de mousson puis les pales s'endorment vaincues de nage elles brassent de l'eau dans l'air Il est l'heure madame de retourner à votre public qui retient son souffle au coin de votre bouche leurs mains fument d'avoir couché les servantes toute la journée sur la terre battue bientôt tous ces gens seront morts sans vous avoir entendue chanter Je soulève l'aiguille sur le gramophone mon coeur se serre de vous entendre pâlir l'affiche tremble un peu le ventilateur pleure vous traversez le temps comme une rizière de visages puis le silence nous unit toute la nuit Un prochain soir de concert d'avant-guerre vous élargirez vos pupilles fendues ferez glisser votre robe tout le long de l'affiche et reviendrez vivre par dessus mon épaule 23-03-2001
-- Les grands atomes du petit ciel --La ville s'épuise grince sur ses prothèses des milliers d'hommes sont passés sur cette grille le trottoir vibre sous mes pas c'est le métro où toi qui pense à moi mes épaules roulent dans cette compression d'hommes je te cherche dans ce grondement sans terre Cette fois sur la grille d'air chaud un souffle de trop a emporté la peau de Marylin en plus de sa robe blanche qui recouvre les yeux des hommes tous les hommes qui passent Elle se tient debout sans robe sans peau sans rôle comme un écorché d'orchidée habillée des briques et des sacs qui se referment clac ce bruit l'empêche de dormir Aujourd'hui tu as fait une scéance de dédicaces tu signais ton ombre sur ton bras j'ai vu les affiches les gens t'emportaient par morceaux je me suis mis à marcher plus lentement pour te comprendre et ouvrir mes poings très doucement pour aérer ton coeur La ville transpire de froid les gens passent patrouille glacée la quadrillent se surveillent sans se voir les magasins fond des soldes sur les draps moites mais ma main s'éclaircit ma main serrée sur le vent doux je te cherche dans ce train sans voyage Autour de Marylin on a dressé des écrans funéraires corps perlés à poignées les fauteuils et les papiers des chewing-gums s'ouvrent la salle est pleine toute la ville pousse la porte les chiens se referment sur mon rire mais pas sur moi clac la vie me va si bien La ville rentre chez moi j'ai acheté un peu de soleil chez le marchand la maison est calme parcourue de couleurs douces et de lianes aux boucles d'air je te cherche dans l'odeur du papier du livre autour de ton bras je réapprends à te lire peu à peu je te prononce à voix basse et tes épines tombent une à une Je renverse la tête en arrière et derrière mes paupières je laisse danser les grands atomes du petit ciel 20-03-2001
À Kishpû. --- Les neuf vies du chat Beauty -- 1ere vie : Lama Gyurme Pour apprendre à aimer Beauty s'est d'abord appelée Lama Gyurme pourléchée de sagesse elle laissait le vent emporter sa robe safran jusqu'en bas des pentes du grand être vivant Quelques maigres rochers blancs et quelques ermites volants au centre exact de leur cellule l'accompagnaient dans ses prières Chaque matin il fallait polir la montagne pour que les grimpeurs y voient se refléter leur vrai visage et certains jours ne pas avoir peur de se brûler les yeux sur le fond du ciel Lama Gyurme recevait parfois des voyageurs qui lui enseignaient qu'une brindille est aussi grande qu'un océan elle savait déjà ce genre de choses mais ça leur faisait du bien de le lui expliquer Elle vécut ainsi quelques premières vies dans les plis du sage au sourire d'enfant Le seul mystère demeurait les femmes elles avaient tous les pouvoirs des mondes et aussi quelque chose en commun avec les lamas et avec les chats mais quoi ? Il y en avait une surtout parfois ses contours se dessinaient une fleur d'ombre sur le mur le soir juste avant le sommeil quand la lueur des lampes à beurre vacille Lama Gyurme lui disait "reste" et son ombre étendait les bras il devinait qu'elle serait là à chacune de ses vies et qu'un jour il saurait déchiffrer sa douceur il aimait si mal il était là pour apprendre quelque soit le nombre de ses pattes En attendant personne ne se rendait compte que Lama Beauty avait tendance à se réincarner en pleine conversation Dans ces moments-là entre chaque contraction du trapèze à méditation elle prétextait une très forte envie de prier et allait s'isoler pour se gratter derrière l'oreille elle savait que ce simple geste ferait pleuvoir un certain jour d'un futur très lointain. Lama Gyurme s'est éteint en temps et en heure juste avant la lampe à beurre cette nuit là sur le mur il y avait deux fleurs d'ombre et dans le ciel juste devant la lune une robe safran a volé très longtemps 19-03-2001
"Dans le noir, toutes les couleurs s'accordent. - Francis Bacon -- Les huit couleurs de l'arc-en-sel -- 1. Les clepsydres ont le sang indigo. Elles sont disposées le long du port pour lancer des reflets cyan sur ceux qui dépassent la limitation d'amour Il faut alors rester le temps d'une vie sur la plage son coeur bourré de paille outremer danse d'épouvantail pour effrayer les bateaux qui coulent de bas en haut * 2 . La couleur turquoise s'est mise en grève de la faim. Je tenais mon stylo entre deux pages d'infinie douceur pour écrire sur mon corps le rire ondulé des cales autour des canots clandestins Mais la couleur s'est mise en grève jusqu'à la quille du stylo pour protester contre la profondeur de tes yeux * 3. Haut comme trois pommes au sommet d'un grand-mât. J'ai posé trois pommes l'une sur l'autre et je suis né sous le vent comme tous les matins dans ce jus d'escalier vert Elles sont si hautes qu'il faut souffler pour évaporer la neige elle s'accumule en mouettes véronèse sur la pomme du dessus quand elle rêve que les fruits ont le droit de se pencher pour toucher les vagues * 4. Le jus de citron fait les yeux diapason. Quand je vois les enfants courir autour des citronniers je me dis que la mer a bien raison d'être restée ici depuis plusieurs ères géologiques pour les border la nuit La règle du jeu est simple tomber pique les yeux rester accroché à l'arbre avance d'une heure la prochaine marée et si on retire un peu d'écorce la mer nous rendra un noyé * 5 . Sur le perchoir des goélands safran. Détachées des falaises les pierres les plus rapides prennent leur envol sans effriter les mains du sol Petits cris en bouts d'ailes ils ne s'approchent pas des maisons personne n'a encore pu les attraper mais leur couleur rivière d'or est très recherchée pour sa saveur raffinée de chair de soleil * 6 . Vos oranges de cheminée sont avancées. Elles poussent dans les flammes qu'on verse pendant les nuits d'été dans l'air en colier doux à l'heure où la mer rend fou Les ancres des filets d'hommes y puisent leur route d'étoile dans un ciel sans arêtes la vie veille la terre peut venir se baigner jusqu'à demain * 7. Comment se repérer au milieu de tous ces bords ? Si nous peignons nos rêves en rouge c'est parce que nos côtes sont trop découpées il faut allonger la durée de sa vie pour recouvrir toute leur étendue Mais cette robe sanguine au bord des lèvres de notre pays décourage d'éclats pourpres les amoureux d'eau douce * 8 . Les ombres des voiles se réunissent en famille. Les jours de corps noir les maisons du port organisent des régates d'étincelles elles s'alignent en rangs d'écume la lumière caresse les persiennes Dos aux vagues il fait bon nager dans le patio de ma maison quand elle rebondit sur sa peau 18-03-2001"La vérité scientifique sera toujours plus belle que les créations de notre imagination et que les illusions de notre ignorance." -- Claude Bernard -- Vajra * - C'est l'heure douce où les cous incinés des embarcadères moussent à même les monstres de sable vif À travers l'intérieur des terres la lumière dansante saigne de bonheur Savamment disposés en rosaces quitte à ne pas rester entiers pour réussir la figure les enfants posent des morceaux de sucre au sommet de leurs châteaux d'hommes il n'y a pas de château comestible le sucre d'enfant fond comme un diamant illusion tout est illusion pourtant l'air est plus rond depuis ce soir Sur la plage des corps se lèvent d'eux mêmes ils pensent à la profondeur des baignoires et à boire leur vie d'un trait dans un verre posé en équilibre sur l'épaule d'une femme qui saute du grand plongeoir Il n'y a pas de planche à rouler jusqu'au ciel cette femme saute du niveau du sol illusiion tout est illlusion pourtant ce verre est bu Tendrement le vent lime les cornes du soleil sous l'eau c'est une idée des enfants qui veulent lui offrir un chapeau pour son trois milliardième anniversaire il n'y a pas de chapeau assez grand le ciel ne prend pas froid par la tête illusion tout est illlusion pourtant le soleil vous salue bien Quelques hommes privés d'altitude prennent des notes à même les vagues pour annoncer d'avance l'heure des prochains clapotis du monde Pour la calculer ils se guident sur les nappes de chaleur la résonance des grains d'olisbos dans le sexe des violons qui rêvent en bancs de cordes sur la mer Il n'y a pas de note plus haute que l'autre et les violons sont remplis d'eau illusion tout est illusion pourtant cette corde a crié 18-03-2001 * "Vajra". Sanscrit pour "diamant"
À Liette, ma fée Clochette, pour son voyage au septième étage. "L'être humain étant fondamentalement un gâteau à plusieurs étages, on peut très bien être triste et gai dans la même cuillerée." - José Fréchette -- Sept étages sur l'horizon du quai -- 1. Les mouchoirs à l'envers. Agités de bas en haut aux antipodes de l'adieu Ils adoucissent l'arrêt des trains dans le butoir des bras Ils volent voiles à courir sur les essieux des mains * 2. L'amour s'est encove sauvé de son flacon. On a remarqué de curieuses coutumes chez les écharpes en exil une sorte d'humour de placard C'est pourquoi tes bagages se mettent à trotter tout seuls c'est plus fort que moi * 3 . Vous decendez à quel coeur ? Dans l'ascenseur n'oublie pas de préciser dans quel sens tu veux voyager Il est capable d'aller dans des directions surprenantes y compris vers les terrasses lovées entre les étages et les lunes décoiffées * 4 . Elle est encore plus belle tout en haut. Vigie de visage au petit matin elle regarde les toits s'allumer un à un Elle ne sait pas tant elle est vaste que c'est elle plus encore que le soleil qui les fait briller * 5. Toi et ton filament du dedans ! Je te connais tu as tellement d'amour que tu sais changer le sens de la grimpette des atomes Alors la nuit quand tu seras là-haut n'oublie pas de t'éteindre juste cinq minutes pour les volets sinon ils voudront rester ouverts * 6. Ces deux chatons font des trous dans les prisons. Quand tu leur donneras un bol de clin d'yeux à tous les deux ils te le rendront encore plus plein Ce n'est pas qu'ils n'aient pas faim non c'est qu'ils font de la musique avec leurs visages et leurs mots dans les tiens * 7. Iris et pupilles d'un carnet de voyage. Surtout ne me raconte rien je lirai tout dans tes yeux quand les miens renaîtront Au septième arrêt de l'horizon du quai arrivée prévue dans le courant de la nuit de demain à aujourd'hui 15-03-2001"Il existe une télévision pour passer le temps et une autre pour comprendre le temps" -- André Malraux-- Six programmes au choix sur nos chaînes -- 1. Pas moyen d'inviter des amis. Ma télé souffre de graves troubles de la vie elle s'est enfermée entre quatre murs blancs et refuse de recevoir de la visite J'essaie de la soigner en la regardant avec beaucoup d'attention mais tout seul je n'arrive pas à entourer tous ses côtés 2. Les bouddhistes rient beaucoup. A cette altitude on ne sait plus respirer sans bouteilles de ciel Pourtant l'enfant s'est assis sur le livre de prières et glisse en riant sur la neige vers la lamasserie 3. Je ne sêche pas n'importe comment. Vous m'apercevez de loin étendu sur la corde à linge j'aime me faire le plus large possible mais si vous me voyez c'est que vous avez beaucoup marché en portant trop de maisons sur votre dos il est temps de vous étendre un peu à côté de moi 4. Il n'y a pas de problêmes, mais que des solutions. Dans ces bûchers on a séparé les filles et les garçons le bourreau ne voulait plus voir leurs cendres mélangées On songe même à faire brûler en permanence des brasiers de couleurs différentes pour que chacun et chacune sache à l'avance dans lequel se jeter 5. C'est à ton âge que tu apprends à compter ? Quand j'étais plus grand il y avait trop de gens à la fois sur la terre Maintenant qu'il y a eu le grand tremblement de lumière je m'y retrouve mieux bien que j'ai encore du mal à savoir combien tu es au chiffre près 6 . Mon sourire a encore grandi de cinq centimètres. Quelques saisons passées à pleurer et voilà qu'il dépasse de mon visage et me raconte des histoires de couloirs bleus et de ponts froids sur des rivières chaudes Mais tout de même grandir comme ça il exagère je ne peux pas me payer un nouveau toit tous les ans 14-03-2001Petites gouttes et grands récipients 8 - Mon livre me joue des tours J'ai entendu murmurer les pages de mon livre préféré qu'elles apprennent à se tourner toutes seules Elles aiment se mélanger la princesse tue l'assassin en dansant sur les mains Quand j'ouvre mon livre il fait ce qu'il veut il se met à courir à haute voix et l'histoire saute par dessus la couverture Au creux des majuscules l'encre couve des espaces blancs bien trop grands Mon livre devient très intelligent plus moyen de le poser tranquillement entre mes mains il devine vite mon début mon milieu et ma suite Je sais que je finis bien mais j'aime bien me surprendre et me poser des questions à cinq doigts Il l'aura voulu je vais le laisser grand ouvert et emporter la clé du mystère pour en écrire un moi-même 14-03-2001
"Celui qui chante va de la joie à la mélodie, celui qui entend va de la mélodie à la joie." -Rabindranath Tagore -- Turangalila * -- (aube en trois mouvements) 1. La terre qui s'ouvre La nuit est tombée et quelque chose s'obstine à briller dans la pierre la plus noire dans la foudre compacte qui lave le visage et la terre cette enfance éblouie qui vole sous les yeux Je ne sais pas je sais si peu l'ordre premler des mots ni les derniers étages de ton coeur dessiné dans le mien le nombre de centimètres cubes pour atteindre le toit du monde je sais juste le poids des couleurs qui soutiennent la courbe de ces feuilles qui traversent l'hiver dans nos paumes esquifs Je voudrais te parler de la roue et du moyeu dessiner le mouvement la folie électrons éclairs de pas à pas ce noyau floraison qui te rend si belle cette valse qui t'allume jusque dans les pièces noires de la maison Je voudrais te le dire sans mots sans cymbales ni raideur amertume mais doucement très doucement si doucement avec trois traits de rosée que je dessinerais sur le ciel avec toi pendant une promenade quelques pas rien qu'à nous un matin si doux que les chiens de la ville seraient sans mâchoires Un matin si profond qu'il contiendrait la mer entière cette vague si tranquille et puissante assise sur ses draps d'anges sous des musiques d'algues cette harmonie d'abysses avec son eau qui nous ressemble quand nous chantons de couler vers le haut de la montagne Le soleil est tombé dans l'escalier et la terre s'est ouverte je tangue l'orichalque je le frange l'éboule l'instaure ce métal mouvant dans le creux du coude d'une étoile aux bras vivants il y a des moments tu sais où j'oublie d'oublier ton tissu parcouru d'encre claire la rivière où tu bouges ce palais soulevé d'ailes et d'eau 2. Le feu aux poudres Puis tendrement entre deux doigts cette mêche qui court de tes pieds à ta tête et incendie chaque seconde pesée sur la balance sur ces rides de justice un enfant rajeunit la patine et ce sont les greniers les premiers nés des bois du monde Ecoute moi laisse moi juste une fois remonter les noeuds de la corde du fleuve et te luire à l'oreille ce soleil complot cet arpège sans butoir et te dire avec les rails de ma silhouette que tu es un train sans fin le plus grand des voyages le début écarquillé d'un monde aux jambes ouvertes Je voudrais t'accompagner jusqu'aux plus basses marches de l'escalier jusqu'au ciment terrible des tessons de poumons et souffler souffler ta forme sillonnée d'amour à travers ces ballons qui tremblent hisser des peaux ruisselantes de fruits comme des voiles comme un baiser qui reste longtemps dessiné sur l'eau Je voudrais ramer dans l'or blessé avec toi de l'autre côté de ta paume qui couvre mes yeux de bruits sourds et croit me protèger de son rideau à mourir maos la mort est ton exact antipode même couchée tu marches 3. Le dehors, le dedans Souvent mes mains n'ont pas d'équerre pour faire le tour de tes angles clair de lune sans diamètre cordes froncées des plis du front harnais à comprendre c'est pourquoi je crie de cuir et gémis de lanières Si tu savais les nuits dièses d'escapades sans mesures où chaque lambeau de peau accroché aux buissons écrit en lettres roses que je marche avec toi si tu savais ma tête cognée contre l'aube quand je reviens de la tournée des oiseaux mes yeux grands ouverts toute la nuit toute la vie qui t'appellent qui t'appellent J'ai appris à pleurer transparent pour te regarder à travers ces chutes qui montent déboîtées d'ascension sans baillons de perles sans levées de lest avec toi ma cathédrale d'églantines toi que je clame toute entière avant de refermer mes lèvres doucement sur cet intérieur tendre cette alcôve irriguée où les heures se cherchent et se touchent avec le bout de nos doigts 13-03-2001 * Sanscrit : "le mouvement de l'amour" (approximativement)"Je trouve mes lectures dans la lumière du ciel. C'est le livre le plus profond qui soit - et ce n'est même pas moi qui en tourne les pages." (Christian Bobin) (En réponse à la réponse d'Aaron) -- Les oiseaux du troisième sous-ciel -- (Lettre trouvée sur le dernier siège de la gare de Toulouse-Matabiau, le siège où s'assoient les gens qui arrivent d'un autre siècle et que personne n'attend. Sous le siège, on a trouvé aussi une épée de Tolède, se terminant par un pommeau en forme de visage d'enfant.) ********* À Maistre Aaron de Najran, orfèvre en anneaux d'étoile. Sis dans l'Atelier de l'Or Volant, derrière la porte des oiseaux errants, au troisième sous-ciel du parking souterrain de l'avenue Jean Jaurés. Toulouse, France. Début du XXIeme siècle. Troisième coeur autour du soleil. * La position des étoiles sous mes paupières m'indique que vous devez vous trouver aux alentours de la fin du XXeme siècle. C'est un choix à la fois sage et insensé. Sage car c'est un temps où personne ne regarde personne et vous pourrez dresser votre atelier de travail dans votre jardin et utiliser la lumière comme matière première sans que personne ne s'en émeuve. Insensé, car beaucoup d'autres matières se font rares, comme les sourires sur les visages. Je sais que vous sertissez des sourires dans vos anneaux d'or, selon un savoir connu de vous seul. J'ai donc pris l'initiative d'en laisser quelques-uns pour vous dans le coffre n°12 de la consigne automatique. Vous le reconnaîtrez facilement, il est gardé par des hommes qui ont cette expression de solitude propre à ce siècle muet de bruit. Ils vous laisseront passer. Figurez-vous aussi que le dos du siège de mon wagon était lacéré. J'ai d'abord cru à une brèche dans mon âme qui aurait traversé le dossier, mais, en l'examinant de plus près, j'y ai trouvé des fissures codées. Grâce à cette écriture de lézardes, je peux vous affirmer qu'il existe encore une mine d'oiseaux-joailliers en activité. Elle se trouve au troisème sous-ciel d'un parking souterrain, dans l'avenue Jean-Jaurés. Hélas, il faut que je vous informe que les oiseaux dont devenus un peuple errant, et que les hommes leur interdisent de pratiquer à ciel ouvert leur liturgie ailée. Mais lorsque vous montrerez le pommeau de mon épée aux oiseaux du troisième sous-ciel, ils verront le visage d'enfant et vous feront confiance. Ils vous ouvriront alors la porte de leur atelier, et vous acquiérerez la science de la fabrication de l'Or Volant. Les femmes ne se contentent plus d'entourer leurs mains de ciel et recherchent cette lumière légère qui sied aux pierres changeantes serties au fond de leurs yeux. À l'heure qu'il est, vous avez dû trouver mon message sur le dernier siège de la gare et vous devez déjà approcher du parking souterrain, je vous vois d'ici, vous lisez en marchant. Sous le parking, les ondes de ma lettre vont se brouiller, elle deviendra dure et les étoiles en tomberont, mais les oiseaux du troisième sous-ciel vous apprendront la suite, et vous en saurez suffisamment pour partir à la conquète de l'Or Volant, dans votre atelier de jardin. Ne me remerciez pas, il faut bien s'entraider entre artisans d'âme. Ce monde s'enfonce dans l'oubli à raison de quelques centimètres par an. Les hommes sont sur le point de redécouvrir l'ADN-Adonaï, mais leur coeur devient de plus en plus friable. Bien à vous et vos environs. * Maistre Stellio di Melli, sculpteur sur eau et coloriste sur peau de lumière. Sis dans le 1716eme molécule de la 3eme statue, extérieur du Palais des Doges, Sestiere San Marco, Venezia, Vénétie. Début du XXIème siècle. Troisième coeur autour dusoleil."La grâce est un bonheur d'expression et de mouvement qui n'inquiète et ne blesse personne." (Alain) -- Quatre positions d'horloge -- 1. Ces coucous sont bien trop doux. Lorsqu'ils sonnent la nappe frémit de joie et déploie ses carreaux Ils ne se vendront jamais les gens préfèrent les aiguilles moins douces que leur peau et les oiseaux sans coeur fragile * 2. Certaines fleurs traversent les siècles. Il suffit de les planter le jour d'une de ses morts si possible quelques minutes après Une fois rempotées dans un homme qui possède plusieurs trotteuses de rechange ces fleurs-là sont impossibles à tromper avec de l'eau colorée * 3. Princesse Profil. Elle fait du trampoline le long des balanciers barbelés derrière le vent bien taillé qui ramène vers elle la musique du bal des bijoux Regard de côté elle chante et sa bouche ouverte prend la pluie comme un compliment * 4. L'esprit et la matière sont dans un bateau. Sans regarder la position des bulles je sais deviner l'heure de la surface J'ai laissé le recto et le verso du cadran discuter entre eux et se déposer sur le fond je préfère cueillir ta voix dans l'eau sur ma peau cerf-volant Quelques molécules suffisent pour repartir du bon pied 11-03-2001Toute photo est une intelligence qu'épuise une lumière." (Denis Roche) -- Cinq photos prises sous mes paupières -- 1. Sans les mains Je suis en train d'écrire un visage avec mon regard Mais je préférerais une feuille sans carreaux celle-ci me fait mal aux yeux et ensuite il faut déblayer la douleur * 2. Pas de l'oie La louve noire sa gueule entravée de bombardiers d'or cent abeilles guerrières fondent une à une sous les vêtements et mangent la peau Une pluie douce lave la cour la vie est belle puisque les chaussures brillent * 3. Même vu d'avion, l'amour paraît toujours aussi impressionnant La piste ne sera pas tout à fait droite pour permettre quelques mouvements d'épaules Toute petite la ville tient dans ma main Assis dans cet oiseau de quelques minutes carrées et sa lumière sous le ventre je me demande si les gens attendent qu'on aterrisse sur eux pour exister * 4 . Le remède au doute est au fond de ma poche droite Juste à la hauteur de cette latte du plancher qui craque comme tu aimes j'ai suspendu mon manteau celui qui est à l'épreuve des larmes n'hésite pas à fouiller mes poches sont les tiennes Pour atteindre l'entrée Il faudra juste creuser un tunnel sous la maison j'ai oublié les clés dans mon corps * 5. La vie et ses nombreux grains Ce fauteuil a la peau vraiment douce je m'y égrène mon dos drapé dans une grande envie de rire Je vais conseiller aux fleurs de rougir sur ses accoudoirs doués de parole 11-03-2001-- Petites gouttes et grands récipients -- 6. Le jeu des portes Avant d'ouvrir les portes j'aime jouer à deviner qui est derrière Parfois je triche en peu en tirant sur le rai de lumière dessous pour voir qui vient au bout Mais le plus souvent je me prépare une surprise même si je me souviens j'oublie Quand il n'y a personne je passe mon tour ou bien je me cache de l'autre côté Sans frapper je regarde la porte bien droit dans les yeux : "rayon sillon de portillon qu'il y t-il derrière le papillon une fille ou un garçon ?" Si c'est toi j'ai gagné une nuit d'été avec des lèvres qui sourient à monter soi-même mais il faut s'acheter les piles 8-03-2001-- Dresseurs d'oubli -- Cette montagne marque midi. je me souviens des bruits dorés serrés autour de moi et sous mes pieds ces feuilles craquantes portes closes des sentiers d'enfants Je suis ce buisson inarticulé oiseau trempé dans le vinaigre je tourne le volant de terre pour voir plus loin sous ces corps d'épaisseurs Je les vois ils dorment dans les terriers les bras noués les yeux raides peintres sur civières ils fouissent les joues creuses de la forêt Les dresseurs d'oubli cet animal à poussière qui bondit hors du corps puis plonge dans l'étang sous le reflet de cette même montagne qui marque minuit dans l'eau 9-03-2001
Petites gouttes et grands récipients 7. Des mollets à rude épreuve Mettons que tu saches faire pousser tes cheveux à vue d'oeil Ou prononcer "sfulsfuli sflulsfuli" vingt fois très vite sans te tromper d'une lettre en chantant même le point sur le i Mattons que tu découpe un avion y compris les hélices dans une blouse d'infirmière Ou que tu parviennes à danser sur tes pleurs enregistrés et extraire de l'or des cernes de tes yeux Et même si tu sais traduire ce que raconte la lune en l'écrivant de bas en haut sur un papyrus à sang chaud et ouvrir grand tes bras jusque derrière ton dos Franchement ça ne prouve rien du tout 9-03-2001
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